lundi 2 mai 2011

Afrique, ce que je crois

Afrique, ce que je crois

par Gerry Taama, mercredi 30 mars 2011, 23:25
Longtemps, j’ai été fasciné par le titre de cet édito de Béchir Ben Yahmed dans jeune afrique, que je l’emprunte avec jubilation.

Libye, jeu de soufflet sur fond d’imposition de démocratie.

En école militaire, on nous a appris qu’il fallait réunir trois conditions avant de s’engager dans une guerre. La première est qu’il ne devrait exister aucune autre solution, la seconde est que la situation après la guerre devrait être meilleure à celle avant, et la troisième, la plus importante, est qu’une fois engagée, on devrait s’assurer de l’emporter. Sur la Libye, il faut croire que les chefs militaires se sont assurés de l’association des trois solutions avant de lancer l’offensive. Mais ce faisant, Sarkozy et les alliés inaugurent une nouvelle ère dans le domaine de l’intervention militaire sous bannière onusienne : celle de l’assistance aux hors-la-loi. Jusqu’ici, les missions onusiennes avaient connu deux étapes, les premières, exclusivement pacifiques, où les casques bleus se sont contentés de regarder les belligérants se massacrer et massacrer les civils (Liban, Congo, inde-Pakistan). Ces missions avaient la particularité de requérir d’abord l’assentiment des parties, d’être parfaitement neutres et impartiales, sans aucun mandat coercitif. Les OMP (opérations de maintien de la paix) de deuxième générations apparaissent après la guerre froide et se caractérisant par l’absence de consentement des parties avant déploiement, l’omniprésence des organisations humanitaires, et surtout la flexibilité des mandats (qui peuvent aller du maintien à la consolidation de la paix en passant par son imposition) exemple : Somalie, Libéria, Sierra Leone… A coté des ces opérations encadrées par l’ONU, les grandes nations ont souvent fait leur petites guerre un peu partout dans le monde, sans demander l’avis de personne, et en s’arrangeant à ce que les autres grands pays ne s’y mêlent pas (Guatemala, Kolwezi, Afghanistan, Irak 2…). Avec les frappes sur la Libye, on assiste à une troisième génération de missions onusiennes, qui pourrait s’appeler « imposition de la démocratie et de la protection des civils", en s’appuyant sur des hors-la-loi. Il faut noter qu’en fonction de leurs protecteurs, et de leur idéologie,  ces -hors-la-loi sont soit des insurgés (Libye) ou des rebelles(Afghanistan) .

Tout de même, une question s’impose : Fallait-il intervenir en Libye ? Oui, pour l’exemple. Nous sommes dans un siècle où il ne devrait plus être possible à aucun dictateur, de massacrer ouvertement sa population en s’abritant derrière la souveraineté nationale. Il est des valeurs que nous devrions partager. J’ai entendu des gens dire, pourquoi les Français n’interviennent pas au Yémen, en Birmanie, en Corée du nord. A ce que je sache, aucun dictateur dans ces pays ne massacre ouvertement sa population, en s’en réjouissant. Je reste persuadé que les logorrhées verbales de Kadhafi l’ont plus desservi que les massacres supposés sur le terrain. Kadhafi a oublié une détail très important dans les sociétés modernes : L’opinion publique. C’est certes normal, il n’en connait pas dans son pays.

Donc, imposition de la démocratie et protection des civils. La seconde condition pour s’engager à la guerre est l’amélioration de la situation après les hostilités. Rien ne nous dit que l’après Kadhafi sera mieux. D’ailleurs, avec la reprise de Ras Lanouf par les troupes du guide, rien ne dit que cette guerre sera gagnée, surtout que les troupes pro-Kadhafi ont vite fait de s’adapter à ce genre de guerre où l’ennemi a la maitrise de l’air. Elles ont abandonné les lourds chars facilement identifiables dans le désert, pour des Toyota facilement maniables, et surtout difficilement identifiables (de celles des insurgés) sur le terrain. L’intervention en Libye ouvre une brèche dans le droit international, qu’il sera difficile à colmater. Mais il fallait intervenir. Plus aucun dictateur n’a le droit de massacrer sa population.


Benin, mon cœur saigne.

Le mythe s’est effondré. Pendant vingt longues années, le modèle béninois a inspiré tous les jeunes africains. Le fair-play et la maturité de nos voisins de l’Est faisait même notre fierté. La messe est terminée. Je ne sais pas si Yayi Boni a gagné les élections ou pas, mais en les organisant dans des conditions aussi chaotiques, il attache définitivement son nom à la fraude. Sa légitimité sera difficile à retrouver. Et il restera dans l’histoire comme l’homme par qui la jarre (aux trous fermés par les doigts de toute la nation) a laissé échapper la précieuse eau. Mon cœur saigne.

Cote d’ivoire : La fin.

Dans un précédent billet, j’écrivais que Gbagbo avait gagné, parce qu'il aurait obligé Outtara à endosser la paternité de la rébellion. C’est à croire qu’au Golf les gens me lisent là bas. Ils ont vite fait de créer les FRCI (Forces républicaines de Cote d’Ivoire) armée disparates sans état major, mais supposée rassembler les ex-rebelles et les loyalistes déserteurs. Depuis le début des hostilités à l’ouest, on a soigneusement évité de parler de FDS abattus ou auteurs de crimes. Tout a été mis sur le compte des mercenaires et des miliciens. Une excellente stratégie de communication qui porte dorénavant ses fruits.  Même si à la tête des trois fronts ne se trouvent que d’ancien chefs de guerre, les troupes loyaliste se rallient facilement à des FRCI, en lieu et place de Forces nouvelles jadis haïs.

L’effondrement du puzzle a surpris plus d’un, mais encore une fois, Ouattara a bénéficié de fins stratèges, alors que du coté de Gbagbo, les officiers ont oublié les ordres d’opération dans les tiroirs pour aller conter fleurette sur les podiums devant des patriotes en délire. La preuve aujourd’hui est que contrairement à 2002 où des colonels et des généraux avaient des zones de front où se dégageait une certaines cohérence dans les engagements, il apparait aujourd’hui que chaque garnison des forces loyalistes est livrée à elle-même, les officiers supérieurs sensés leur donner des ordres d’opération, plastronnant à la RTI ou plutôt occupés à consolider leur fortune. Le plus admirable coup de stratégie militaire a été la fixation des troupes à Abidjan. En déclenchant une guerre de guérilla dans Abidjan, les forces pro-Ouattara ont fixé une part non négligeable des troupes fidèles à Gbagbo. En tentant de reprendre Abobo, alors que le mode opératoire (chars avec peu d’infanterie, incapable d’occuper le terrain) ne s’y prêtait pas, les FDS ont laissé tout le temps nécessaires aux FN, enfin, aux FRCI, de fourbir les armes, de compléter les effectifs, et attendre patiemment le piège de l’UA. En effet, les atermoiements de l’UA étaient motivés, à mon avis. D’une part parce que personne ne pouvait envisager la possibilité de faire la guerre à un président parce qu’il avait fraudé les élections (précédent dangereux pour tous les autres président) et d’autre part parce que les FN assuraient qu’elles pouvaient faire le boulot, pour peu qu’on leur donne un peu de temps, et les moyens aussi, je suppose. Ce que l’UA a fait. Dès que les forces pro-Ouattara ont annoncé avoir fini leur préparatifs, l’UA s’est empressé de donner les conclusions (contraignantes) du panel, alors qu’elles l’annonçaient pour la fin du mois. A partir de cet instant, l’engrenage s’est mis en place, et plus rien ne l’arrêtera. On risque malheureusement d’assister à un scénario à la congolaise, où un président part en exil pour épargner sa capitale (sous pression des diplomates étrangers) d’où il appellera la mort de toutes ses forces pour échapper à la potence de la CPI.
Comme je l’ai souvent dit dans mes posts, je ne sais pas qui a réellement gagné les élections dans ce pays, mais j’ai une conviction. C’est que ce pays merveilleux mérite de retrouver la paix, et Gbagbo s’était mis dans une situation où il ne pouvait plus la leur apporter.

1 commentaire:

  1. Je republie cet article publié sur le blog de Gerry taama, dont le lien est : http://www.gerrytaama.net/article-afrique-ce-que-je-crois-par-gerry-taama-70630934.html

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