lundi 2 mai 2011

Lettre ouverte à Mr Gerry Taama – Commentaires sur son « Ce que je Crois »


Lettre ouverte à Mr Gerry Taama – Commentaires sur  son « Ce que je Crois »


Dans la journée du Samedi 30 Avril 2011 soit exactement un mois après sa parution, j’ai eu le plaisir de lire un nouveau « Ce que je crois » écris cette fois-ci, non pas de la main du Directeur de Jeune Afrique, mais par un compatriote, et pas des moindres, Gerry Taama. Le « Pas des moindres » sus-mentionné a toute son importance et s’amarre parfaitement à son écriture du point de vue forme et fond, vu qu’à la lecture de son article, on relève qu’il manie aussi bien la stratégie militaire, l’analyse politique et la langue française. Avec votre  permission, Mr Gerry Taama, je publie donc cet article sur mon blog, avant d’y ajouter mon commentaire personnel, pour exprimer non pas un véritable contre-pied, mais on va dire, un « ce que je pense » de votre « ce que je crois ».

Trois pays auront retenu l’attention de Gerry Taama. Ce sont inévitablement des pays qui font la pluie et le beau temps dans l’actualité, ou si nous voulons, à la lecture des évènements et de l’article en question, des pays qui font essentiellement le mauvais temps dans l’actualité.



D’abord la Libye où Gerry tente de justifier l’intervention militaire de l’OTAN bénie par les Nations-Unies. Il faudrait d’ailleurs s’en affranchir : les Nations-Unies sont depuis longtemps devenues une grenouille de bénitier, une béni oui-oui, de l’OTAN dont les pays membres, rappelons-le, sont tous autant qu’ils sont, membres permanents du conseil de sécurité. Car c’est bien de sécurité qu’il s’agit en Libye. Le pays a une bonne sécurité financière, grâce aux exploitations de pétrole, et bientôt de gaz naturel, les habitants ont apparemment une bonne sécurité financière, c’est un pays leader de sécurité armée, à cause de son armée d’élite, etc. On a juste l’impression que ces membres de l’OTAN jalousent un peu cette multisécurité et n’ont qu’une envie, assurer leur sécurité financière aux dépens de celle de la Libye. Je m’explique ; 

Gerry relève au début de son analyse, « le jeu de soufflet », qui impose la démocratie dans un pays qui apparemment depuis quatre décennies n’en a jamais exprimé le besoin. Bien au contraire, et c’est ici que je m’oppose à l’auteur et que je penche un peu vers le commentaire fait sur facebook d’un Morgan Palmer qu’on ne présente plus ; la Libye, formidable réserve pétrolière du monde, et depuis peu aussi de gaz naturel, a toujours fait preuve d’Etat uni derrière son leader, son « guide », comme lui-même il aime à s’appeler, en prenant des étiquettes successives d’Etat terroriste (attentat de Lockerbie) puis d’Etat ami (avec la France, l’Italie et même les Etats-Unis) depuis la fin des années 90. L’affaire des infirmières bulgares qui connut un heureux dénouement grâce à une amitié franco-libyenne dont Cecilia Sarkozy, première femme du Chef d’Etat Français, fut visiblement le chantre et la négociatrice, les nombreux contrats d’exploitation de gisement pétrolifères signés entre l’Américain Chevron Texaco et l’Etat Libyen, ou encore entre l’anglais British Petroleum et l’Etat Libyen, les nouveaux gisements découverts en 2008 censés être attribués à l’exploitant français TOTAL, (avant que le guide ne se détourne une fois de plus vers les Américains), ajoutés aux importantes sommes versées au Président Français, pour sa campagne électorale, à titre de soutiens financiersselon la famille Khadaffi ;La Libye a elle-même présidé une commission des droits de l’homme à l’ONU en 2003 (qui l’eut cru dans les années 80), s’est engagée dans des actions humanitaires, localisées pour la plupart en Afrique subsaharienne, s’est réconciliée avec Idriss Déby du Tchad, indemnisé les familles des victimes des attentats aériens, provoquant in fine une levée de toutes les sanctions internationales pesant contre elle.

Que d’étrennes n’ont donc été échangées entre La Libye et les pays membres de l’OTAN qui aujourd’hui lui font la guerre ? Que de bonnes volontés n’ont été brandies par Khadaffi pour afficher sa reconversion en néo-capitaliste libéral. Peut-être le poids de sa vieillesse y était-il pour quelque chose. Mais surtout, si tous ces éléments montrent à suffisance qu’entre Libyens et Alliés de l’OTAN, il a été longtemps question d’une histoire d’amour à la « je t’aime, moi non plus », quel évènement majeur aurait amené France, Grande-Bretagne et Etats-Unis, à procéder à un formidable retournement de veste, voire même à un strip-tease, pour faire de la rébellion libyenne, son nouvel ami d’enfance.

Avant de revenir sur les probables raisons des « insurgés de l’OTAN » (j’ai inventé l’expression de toute pièce, et avec sourire), arrêtons-nous un peu sur cette « Rébellion Libyenne, néo-insurgés, on pourra même parler d’Intifadistes, qui avaient longtemps constitué une arête dans la gorge du régime Libyen. Ils ont été « Frères musulmans » apparentés au groupe du même nom en Egypte, « Islamistes fondamentalistes », reprochant au régime libyen de s’écarter des « hadiths » du prophète Mahomet. Ils existaient bien à Benghazi, accomplissaient des mini-actions armées, rapidement étouffées par l’armée Libyenne formidablement entraînée et préparée pour ce genre de situation. Bien longtemps déjà, à cette époque-là, on aurait déjà surnommé cette rébellion, Al-Qaida ; Bien longtemps avant l’évènement capital du 11 septembre 2001 qui avait rappelons le, modifié la géopolitique dans le monde arabo-musulman.
Al Qaida, c’est le nom que s’est tué à répéter Khadaffi, durant ce que Gerry Taama appelle ses « logorrhées », pour désigner la rébellion armée Libyenne. Ce nom dont Gérard de Villiers donne une explication exhaustive dans l’un de ses SAS : Al Qaida Attaque, dont je laisse l’extrait à votre appréciation à la suite de cet article.

Certains de mes amis étudiants, lors de nos discussions sur l’actualité internationale, me firent remarquer que c’est d’ailleurs, après le 11 septembre que les Khadaffi et les Américains se sont rapprochés, vu qu’ils combattaient chacun le même ennemi. Khadaffi, combattait son Al-Qaida, à Benghazi et les Américains, le leur, à la lisière du Pakistan et de l’Afghanistan. Ces deux groupes bien qu’opérant sur deux territoires différents et peu ou prou éloignés étaient fondamentalistes, extrémistes, et prônaient visiblement le wahhabisme, cette interprétation trop littérale des textes coraniques qui conduisent toujours au Jihad ou guerre sainte.

Mais encore, cette opposition-rébellion, aujourd’hui administrée par des pseudos avocats, juges et brillants hommes de lettres Libyens a semblé dormir pendant trop longtemps sur ses lauriers, sans aucune volonté manifeste d’engager des réformes politiques ou le moindre pourparler avec « le guide révolutionnaire ». La preuve, le PIB Libyen se porte très bien, et flirte aisément avec celui de la France ; là-bas comme en France des allocations sont versées aux sans emplois, et encore, le carburant n’y coûte pas grand’ chose, étant largement subventionné par l’Etat Libyen, sorte d’Etat providence (à qui visiblement, toute la France faisant le plein à près de 40 euros, a tout à envier). D’ailleurs, on dénombre un pourcentage élevé de voitures 4 roues motrices (Toyota Hilux et ses soeurs) parmi les voitures que l’on voit circuler aussi bien à Benghazi qu’à Tripoli rien qu’en suivant l’actualité à la Télé. Et de là, visiblement, on peut se dire que Khadaffi n’a fait que trop de bien à ces hommes repus des avantages qu’il leur a gracieusement fourni, ces hommes qui aujourd’hui manipulés lui demandent de partir parce qu’ils s’ennuient de voir sa tête et son livre vert les empêcher d’ouvrir la bouche pour lui dire « Merde ».

 Sinon, pourquoi les tenants de l’opposition armée libyenne ont attendu qu’un Tunisien s’immole par le feu chez lui, déclenchant la vague de protestations et de manifestations, là encore, non arméedans son pays, suivie de celle égyptienne pour faire preuve à leur tour d’un suivisme béat et inutile, sinon, couteux en vies humaines ?

Mr Gerry Taama ne le sait que trop bien. Dans beaucoup de pays Africains, apprentis de la démocratie, il est très facile de justifier des morts d’hommes durant une manifestation, surtout quand les armes sont partagées des deux côtés : ceux qui devraient avoir légalement des armes, policiers, gendarmes, ou même militaires ; et ceux qui ne sont pas supposés en avoir mais qui montrent tout de suite qu’ils en ont, je veux dire population civile qui manifeste. Dans ces cas-là, l’invocation de l’atteinte à la sûreté de l’état est la voie royale pour justifier ensuite le pourquoi du massacre qui s’en est suivi.

Revenons aux raisons des alliés Américains, Français et britanniques. Ce que je pense ? Je pense que les opposants libyens, ont surtout voulu faire les malins et profiter d’une situation de poudrière arabe pour tenter d’évincer le numéro 1 libyen. N’ayant aucun moyen de faire un coup d’état à un régime solidement ancré à Tripoli, ils ont voulu profiter de la vague révolutionnaire du monde arabe, pour tenter, avec beaucoup d’hommes et peu d’armes, de renverser un pouvoir militaire, armé et immensément riche. (Un récent post de BetriEkué-Hettah, sur la page du groupe facebook « Polémiq’alement Vôtre » a fait d’ailleurs état de l’importante réserve de la Banque Centrale Libyenne). La France, la Grande Bretagne et les Etats-Unis lorgnant le pétrole et le gaz naturel Libyen, se sont donc mis dans la danse, espérant avoir affaire à de nouveaux partenaires Libyens dans l’après Khadaffi, des partenaires plus souples, qui vendraient moins cher, ou qui n’auraient pas suffisamment d’expérience ou le sens des affaires pour traiter avec eux, les exploitants, seuls détenteurs des technologies d’extractions de ces minerais, et seuls grands investisseurs.

A l’évidence, ceci est de bonne guerre. Au demeurant, c’est encore une logique de business. Sinon, comment comprendre que le contribuable français, paie pour 4500 euros un Aller-retour d’un avion de chasse français, entre Tripoli et un porte-avion dans la méditerranée, et que un seul missile lancé durant l’opération a un coût lui-même chiffré en milliers d’euros. Il s’agit purement d’investir en moyens de guerre, de faire partir Khaddafi, dont on présente l’image négative du dictateur qui n’a que trop duré et qui a tiré sur une population civile, pour in fine, exploiter le pétrole avec la bénédiction de nouveaux partenaires libyens.

Je crois que l’opposition libyenne soutenue par Sarkozy aurait brillé par son intelligence s’ils avaient un tant soit peu copié sur le modèle de démocratisation Togolais ou Béninois. Des petits mouvements de grèves saupoudrés sur une année, pour aboutir à des assises, une conférence nationale, dans laquelle on parlementerait et aboutirait à la création d’une république ou au moins d’un royaume avec une chambre ou deux chambres parlementaires et un véritable gouvernement formé par un premier ministre nommé au sein de la majorité parlementaire. Au Togo, cela avait partiellement marché, avant que d’autres se croyant plus intelligents se braquent dans un radicalisme et s’illustrent dans une idiotie patente de non-négociation. Au Bénin, cela a très bien marché, ouvrant le pays à des idéaux et à des libertés que le Président-dictateur est lui-même revenu incarner par la suite. C’est, « je crois » ce qui aurait été mieux pour la Libye. C’est « Ce que je crois » pour ma part.

Sinon, au sujet du Bénin, le deuxième pays dont vous avez parlé dans votre article, je vous trouve exagérément alarmiste. Oui Yayi Boni a organisé une élection frisant la mascarade, oui, il a peut-être usurpé une victoire, mais aujourd’hui, je crois qu’il faut surtout ne pas chercher des poux sur la tête de gens qui n’ont pas de cheveux. Qu’on laisse Yayi Boni faire son deuxième mandat. Toute l’Afrique devrait aujourd’hui avancer dans un contexte de « Comment apprendre à accepter les résultats des élections ». Des résultats qu’ils soient fiables ou non. Même l’élection de George Bush a été sujet à polémique dans la plus importante démocratie du monde. Comment ne voulons-nous pas voir des petites coquilles dans nos organisations d’élections, sûrement moins bien organisées que chez nos partenaires de l’hémisphère nord. Laissons le « Yayi » aller au bout de son deuxième mandat. S’il cherche à faire le malin pour changer ne serait-ce qu’un bout de constitution dans le but de se représenter, ce dont je doute fort, alors on pourra reparler de tout ceci.


Enfin, sur la Côte d’Ivoire, j’ai été particulièrement admiratif sur l’explication de la stratégie militaire des FRCI que vous avez si bien décrite ; puis sur la stratégie politique coordonnée de l’UA et du camp Ouattara, aboutissant au début de l’attaque des bastions Pro-Gbagbo, juste après la remise des conclusions du panel de l’Union Africaine. A la rigueur, je vous aurais donné un grade de Général, si jamais vous n’en aviez pas déjà. Je serai même tenté de vous demander comment ont été géré les collaborations FRCI – Commando Invisible de IB, et pourquoi ses lieutenants comme le Colonel BAUER, se sont tus et ont accepté stoïquement sa mort qui, on le sait, arrange bien de gens dans le camp Ouattara. Mais comme vous le dites, il faut juste espérer que la Côte d’Ivoire se porte mieux sous Ouattara et retrouve la paix que Gbagbo ne pouvait plus lui apporter. Vos mots ont de loin exprimé en de meilleurs termes ce que j’ai toujours pensé de la Côte d’Ivoire et de Gbagbo : « C’est que ce pays merveilleux mérite de retrouver la paix, et Gbagbo s’était mis dans une situation où il ne pouvait plus la lui apporter »

Je vous réitère donc toute mon admiration et espère vous lire souvent pour m’instruire de vos analyses. Cela a fait un certain bien à ma gouverne et je vous en remercie.

WenceAdzimahé,
Bloggeur

4 commentaires:

  1. Euh! que dire en dehors de bravo. Voila les voix du Togo qui portent, afin que le grain germe et féconde la terre. Félicitation encore. Vraiment.

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  2. Un détail t'a échappé, Wence, mets un lien vers l'article en question. ça te fait de trafic sortant, et ça permet à ce qui te lisent de mieux se faire une idée. Bien à toi.

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  3. merci Dou
    j admire moi aussi Gerry et chaque fois que le lis je suis........; bon sans mots
    toi ton travail est .......... sans mots bon
    bref merci

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  4. J'adore et en plus où est ce que ce "Moi" trouve les mots qu'il associe à toutes les pensées qu'il traduit à l'écrit à travers tous ces posts?
    Adzimawhite comme toujours un autre regard sur l'actu!

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