lundi 4 juillet 2011

Mettre de l’eau dans son vin : Dosage et Prescriptions

Pour ceux qui de loin, sont comme ma modeste personne, des aficionados du vin, ils auront vomis l’expression : « Mettre de l’eau dans son vin ». Et sur ce plan, nous nous comprenons entre amateur de bon vin : Y mettre de l’eau est un véritable gâchis ; il ne faut pas gaspiller le vin. Mais si « Couper son vin » en dénature incontestablement le goût pour les connaisseurs, cela a l'avantage pour les autres de le rendre moins alcoolisé et d'en diminuer le corps, la cuisse, la générosité, etc. Cette atténuation des effets ou des qualités du vin par l'eau se retrouve dans le sens figuré de cette expression qui est ancienne puisqu'on en trouve une forme dès le milieu du XVIe siècle. Et son sens a aussi évolué car, aujourd'hui, elle s'applique principalement aux exigences ou aux prétentions. Déjà en 1636, un certain Fleury de Bellingen en donnait la signification : « modérer ses passions comme la chaleur excessive du vin est tempérée par le mélange de l'eau ».

C’est bien de Prétentions et d’exigences qu’il est question depuis une semaine au Togo. Les prétentions et les exigences qui sont le leitmotiv d’éternels arpenteurs du macadam du jeudi et du samedi, qui comme Sysiphe roulent indéfiniment un rocher jusqu’au sommet de la colline . C’est également Prétentions et exigences que l’on retrouve dans la plateforme revendicative du MEET, le Mouvement pour l’Epanouissement de l’Etudiant Togolais, un syndicat estudiantin qui a fait de l’amélioration des conditions de vie des apprenants de l’Université, son combat. 

Un combat légitime face à des adversaires ô combien coriaces. Ils ont une certaine compétition politique dans les jambes, ils savent ruser et convaincre en portant la loi de leur côté ; Pire encore ils savent quand mater ceux qui ne sont pas contents et justifier ensuite leur tabassage en règle par la loi. Trop de fois, ce spectre de la loi (sorte de démocratie du plus fort qui est la meilleure) a été brandi pour mater à coups de gaz lacrymogène et de matraques la masse populaire aigrie et soulevée. Une machine infernale qui fonctionnait. Ses engrenages qui semblaient si bien huilées s’ensablèrent pourtant le jour où elle rencontra le MEET ; La rencontre qui changea définitivement la face du débat politique gouvernement-population.  Sinon comment expliquer que pour la première fois dans l’histoire du Togo, le gouvernement lui-même fasse diligence et foule au pied l’autorité du Président de l’Université pour rétablir dans ses droits, l’étudiant abusivement exclu. Exclu pour avoir osé ouvrir la bouche et porter une critique acerbe sur la gestion de l’université ; exclu pour avoir au nom du principe démocratique, dénoncé le malaise, le marasme, le malaise-marasme qui environne les universités du Togo. Comment expliquer que le gouvernement lui-même ait pu s’adonner au donnant-donnant politique, demandant aux étudiants de faire machine arrière pour qu’ils en fassent autant de leur côté ? Surseoir la marche côté étudiant contre le retour du Président du MEET et la mise en place d’un cadre de dialogue MEET-Gouvernement.
La réponse se trouve immanquablement dans la contestation telle qu’elle a été gérée du côté des étudiants du MEET. Car qu’on se le rappelle, leur foi a soulevé des montagnes de négociation, ils sont passés sur des chemins où leurs aînés ont blanchi sous le harnais, en invoquant moult marches et prières inutiles. 

Le concret, l’ouverture politique en temps opportun, la fermeté en temps voulu, voilà la politique telle qu’elle doit être menée dans ce Togo. Au demeurant, le gouvernement et le MEET auront montré une certaine maturité politique dont certains ont manqué pendant plus de quinze ans sur la terre de nos aïeux. Celle qui définit la négociation politique comme la table où on accepte de perdre un peu de chaque côté. N’en déplaise à ceux qui ont voulu charger de symbolisme, cette simple histoire de revendications estudiantines qui n’en demandait pas tant. On nous a prédit des marches estudiantines vers la présidence ; d’autres ont promis de marcher sur la présidence, avec des étudiants qui ne leur ont rien demandé.
Aujourd’hui plus que jamais, le peuple togolais tout entier s’en affranchira. Marcher pour marcher ne paye pas. Prévoir de marcher en ayant posé des préalables et des dispositions pour un cadre de dialogue ouvert paye. Les étudiants ont montré le chemin. Ils ont donné la leçon du dosage exact du vin politique qui jouxte le débat dans la cité. Quand faudra-t-il mettre de l’eau et quand devrait-on tirer du vin aigre et acéré de derrière les fagots (vin pur) ? D’ici là, la leçon vaudra encore un fromage. Les corbeaux seront ceux qui n’ont rien compris pendant que les renards, eux, prolifèrent !

Vence Eekay Adzimahe
Elève-Ingénieur Réseaux Télécoms
04.07.11

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